La City, Canary Wharf. Deux quartiers voisins de Londres qui symbolisent tous deux la puissance économique du Royaume-Uni. Le premier, la puissance financière avec ses banques internationales (HSBC, Barclays…), le deuxième la puissance juridique avec ses grands cabinets d’avocats.

 

L’alliance du banquier et de l'avocat est une composante essentielle de la suprématie britannique en matière économique : une très grande partie des affaires conclues à l’international passent en effet par Londres et sont donc régies par le droit britannique des affaires. En cas de litige, ce sont les juridictions britanniques et la common law qui s'appliquent.

 

A l’échelle européenne, les grands cabinets d’avocats londoniens ont progressivement imposé la common law britannique dans les instances européennes, confortant ainsi la place forte de Londres sur les marchés financiers européens et mondiaux. Mais le Brexit pourrait véritablement changer la donne : en quittant la place londonienne pour le continent, le centre névralgique financier de l'Europe pourrait bien rebattre les cartes.

MS JMI - Le quartier de Canary Wharf à Londres

Enjeux politiques et économiques

Première conséquence du Brexit : le siège de l’Autorité Bancaire Européenne (ABE), qui supervise le système européen financier, déménagera de Londres en 2019 pour s’installer à Paris dans le quartier de la Défense.

La France, la Belgique et l’Allemagne ont toutes 3 créé une chambre commerciale internationale, qui permettra de traiter les litiges relatifs aux contrats du commerce international, qu’ils soient soumis au droit national ou à celui d’un autre pays.

 

Les chambres de commerce internationales nouvellement créées pourraient donc prendre en charge des litiges relatifs aux contrats de commerce international. Les audiences et les actes de procédure pourront être en anglais ou dans une autre langue étrangère. En France, en revanche, les actes de procédure devront être systématiquement traduits en Français, conformément à la loi.

Droit britannique ou droit européen ?

Si ces dispositions pourraient renforcer la France, la Belgique ou l’Allemagne dans le traitement des litiges dans les contrats internationaux, il faut garder à l’esprit que la langue n’explique pas à elle seule la puissance de la place britannique dans ce domaine. C’est bien la structure et la qualité du droit britannique, ainsi que l’expertise des magistrats britanniques qui a permis d’imposer le Royaume-Uni comme le pays de référence en la matière. Les entreprises choisissent le droit britannique pour des raisons pragmatiques, d'efficacité et de performance. La capacité des juridictions à traiter des litiges constitue bien pour les entreprises l’enjeu central, plus que la langue ou la localisation.

Quel impact sur le droit des affaires ?

Mais quelles seront les conséquences concrètes du Brexit pour les entreprises de l’UE ? Voici les principaux changements juridiques à anticiper :

 

Contrats internationaux :

  • Les contrats faisant référence au droit européen devront être modifiés, afin de préciser les dispositions spécifiques au Royaume-Uni.
  • Il existe un risque de rupture ou de résiliation de contrats faisant référence au droit européen, le Brexit pouvant en effet constituer un cas de force majeure.

 

Fiscalité :

  • Le Royaume-Uni pourra déterminer librement sa politique fiscale : TVA, droits de douane...Des secteurs pourraient ainsi bénéficier d'exonérations d’impôts ou, au contraire, d’une augmentation de la pression fiscale.

 

Litiges :

  • Les jugements britanniques seront traités comme ceux d’un État-tiers non lié par une convention bilatérale ou multilatérale (droit international privé commun).
  • Les décisions rendues par les juridictions britanniques ne pourront pas être directement exécutées sur le territoire des États membres de l’union. Ce frein constitue un risque juridique pour les entreprises britanniques, qui pourraient alors préférer saisir directement une juridiction d’un État membre de l’UE.

 

Propriété intellectuelle :

  • Les titres de brevets, de marques, de dessins ou de modèles ne seront pas impactés car ce sont des titres nationaux. De la même manière, les brevets européens délivrés par l'Office Européen des Brevets (OEB) ne seront pas affectés, l'OEB n'étant pas une institution de l'UE.
  • Le projet de brevet unitaire européen, qui permettrait de breveter une technologie d’un seul coup dans 26 pays de l’Union européenne est nettement fragilisé par le Brexit.

 

Protection des données :

  • Le Royaume-Uni ne sera plus soumis au RGPD (Règlement général sur la protection des données) après le 29 mars 2019. Pour autant, il est probable que le Royaume-Uni légifère avec un niveau de protection similaire au RGPD. L'autorité britannique de la protection des données personnelles (Information Commissioner's Office - ICO) a d’ores et déjà précisé qu'un niveau élevé de protection des données personnelles serait maintenu au Royaume-Uni.

 

Avec le Brexit, la maîtrise des nouveaux enjeux en droit européen des affaires est un atout déterminant dans la carrière des juristes internationaux. Le Mastère Spécialisé ® Juriste Manager International d’emlyon business school répond aux nouvelles exigences des entreprises qui souhaitent intégrer dans leurs équipes des juristes d’affaires (juristes d’entreprise et avocats d’affaires) dotés de compétences en management dans un contexte international avec une dimension interculturelle.