Les aléas météorologiques et les nombreuses alertes du GIEC rappellent l’évidence : le climat change et la perspective de la hausse des températures va durablement impacter nos modes de vies et nos économies. Dans ce contexte, emlyon business school propose, dans le cadre de son Mastère spécialisé MAEVA (Management des Entreprises du Vivant & de l'Agroalimentaire), un module dédié aux stratégies de durabilité des systèmes alimentaires. Présentation avec Bertrand Valiorgue, professeur en stratégie et gouvernance des entreprises à emlyon business school.
Pourquoi est-ce aujourd’hui indispensable de s’intéresser à la question du dérèglement climatique ?
On sait que le climat change. C’est avéré et dit mais plus ou moins accepté et entendu. Le rapport du GIEC indique que le climat se transforme et que la hausse des températures pourrait atteindre + 6 degrés. Il faut comprendre que cette hausse change totalement les paramètres de fonctionnement de la planète Terre : courants marins, hydrométrie, luminosité, apparition et disparition d’espèces… La planète va changer de visage et on va entrer dans une nouvelle époque écologique appelée l’anthropocène. Les conséquences seront très importantes, particulièrement pour l’alimentation et l’agriculture. Les entreprises, les dirigeants et les managers doivent en avoir conscience et se préparer.
Comment le monde agricole et agroalimentaire va-t-il être impacté ?
Des zones alimentaires vont disparaître, d’autres vont être considérablement fragilisées et ne pourront pas avoir les mêmes rendements. Certaines zones vont être avantagées, notamment celles autour de la mer Noire. Cela complexifie la production alimentaire et les entreprises doivent imaginer des solutions.
La guerre en Ukraine accélère-t-elle le mouvement ?
Oui c’est même un énorme accélérateur. L’Ukraine est une terre très fertile en blés, céréales, tournesols... Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si ce pays est ciblé. La guerre conduit à une flambée des prix des matières premières et le monde doit bouger brutalement.
Comment est positionnée la France sur ces sujets ?
La France fait partie des pays les mieux loti en matière d’agriculture. D’autres, comme la Chine, vont vivre des situations très compliquées. En France, on bénéficie de sols, de températures et d’un climat qui nous permettent d’être excédentaires. On arrivera à s’en sortir même avec un climat dégradé. Mais nourrir tout le monde coûtera plus cher. Il faut faire des efforts pour sécuriser nos besoins alimentaires.
Comment les entreprises se saisissent-elles de ces questions ?
Elles travaillent pour faire émerger une agriculture apprenante et résiliente qui apporte des solutions aux défis climatiques. Cette agriculture de demain ne peut pas se contenter d’être bio, elle doit avoir un impact positif, préserver la biodiversité et les ressources. Cela implique de faire totalement différemment. Des entreprises comme le groupe Bel, sont très engagées dans cette transition. Elles sont suivies par de jeunes pousses très prometteuses, qui innovent.
Comment leur gouvernance doit-elle évoluer pour s’inscrire dans ce mouvement ?
L’entreprise ne peut plus être considérée comme une machine à distribuer des dividendes. Elle doit repenser son impact, limiter sa dépendance énergétique voire revoir son business model pour certaines. De nouveaux modèles d’entreprises, plus vertueux, émergent en France et c’est une bonne nouvelle.
Quels rôles les étudiants d’emlyon peuvent-ils jouer face à ce défi d’avenir ?
Ils doivent saisir ces enjeux, les comprendre pour les intégrer dans la conduite de leurs missions. C’est aujourd’hui un impératif car ce sont les managers et dirigeants de demain. Ils sont déjà moteurs de changement : ils choisissent les entreprises dans lesquelles ils ont envie de travailler, celles qui bougent, innovent, réduisent leur impact. En étant vigilants à l’implication des sociétés, ils engagent le mouvement.